Retards d’abattages : la filière porcine encaisse le choc
En raison des jours fériés de mai et de la fermeture temporaire de deux abattoirs, dans lesquels se sont déclarés des foyers épidémiques, les abattages de porcs ont pris des retards importants. Le point sur la situation de la filière avec François Valy, président de la FNP.
180 000 porcs. C’est l’ampleur du retard qui a été pris par les abatteurs dans la filière porcine. Une situation qui résulte d’une conjonction de plusieurs facteurs. D’une part, la survenue de foyers épidémiques de Covid-19 dans deux abattoirs -Tradival, dans le Loiret, et Kermené, dans les Côtes d’Armor- a nécessité des mesures sanitaires drastiques et entraîné leur fermeture pendant une quinzaine de jours. D’autre part, la présence de trois jours fériés dans le mois de mai a également contribué à la désorganisation des abattages. Le résultat est ce retard important ayant entraîné des pertes pour les éleveurs qui ont, à la fois, vu un grand nombre de leurs porcs déclassés et fait face à une consommation accrue d’aliment.
Le 2 juin dernier, la préfecture de la région Bretagne a réuni tous les acteurs de la filière porcine (syndicats d’éleveurs, opérateurs de l’amont et de l’aval, chambre d’agriculture…) afin de trouver une solution. A la demande d’aides financières des éleveurs, la préfète a opposé une fin de non recevoir et a invité la filière à s’organiser. Une position insatisfaisante pour les syndicats. « L’État nous dit que c’est un problème d’organisation de notre filière mais la filière porcine est pourtant, et de loin, la mieux organisée », affirme François Valy, président de la FNP.
« Les abatteurs jouent le jeu »
A la recherche d’un marché de dégagement, la proposition de rediriger une partie des carcasses vers la filière pet food a été refusée à l’unanimité. Il reste donc à trouver des débouchés commerciaux en France et à l’export. Dans un premier temps, François Valy se réjouit d’avoir obtenu des abatteurs un engagement à résorber les retards d’abattages à la date du 30 juin. Si cet objectif est réalisable, grâce à trois jours ouvrés de plus en juin, « il suppose d’augmenter les cadences, et surtout, d’acheter plus de porcs », souligne-t-il. Et d’ajouter: « pour le moment, les abatteurs jouent le jeu. »
Reste à voir ce que deviendra la consommation dans les mois à venir. « Avant tout, un retour à la normale ne se fera que si les salaisonniers suivent le mouvement et achètent de la viande française », précise François Valy. Concernant l’export, l’Europe pourrait tirer profit des tensions entre les USA et la Chine car elle devient plus compétitive dans cette situation. Par ailleurs, il subsiste de nombreuses incertitudes quant au marché intérieur. « Nous ne savons pas encore ce que vont devenir les échanges de touristes avec les autres pays », souligne François Valy. Le solde sera-t-il en faveur des consommateurs en France ? Il est presque impossible de le prévoir. « Nous ferons un bilan en septembre », observe-t-il. Enfin, la consommation dépendra aussi de la météo, imprévisible par définition.
« Nous n’avons jamais cessé le travail »
A l’issue de cette période de confinement, inédite sur bien des aspects, les éleveurs de porcs se sentent quelque peu délaissés. « Certaines entreprises reçoivent des aides auxquelles nous ne pouvons avoir droit parce que nous n’avons jamais cessé le travail », regrette François Valy. Il tient cependant à souligner que justement, malgré les incertitudes, les éleveurs ont assuré la continuité de la production et ont permis un approvisionnement continu en viande de porc, « la moins chère des viandes », rappelle-t-il. « Grâce à notre travail, les magasins ne sont jamais vides », conclut-il.