Élevage Belloeil : contractualiser sa production pour s’offrir la liberté

À l’heure où la filière connaît des difficultés en termes de rémunération, la construction d’une maternité liberté est une démarche financièrement risquée. Mickaël Belloeil, éleveur à Saint-Mayeux (22), s’est donc engagé dans le collectif niveau 2 de Kermené. Une stratégie qui doit lui permettre de supporter le coût des 46 nouvelles cases de mises bas en sécurisant le prix de vente de sa production.

Mickaël Belloeil, gérant de l’élevage, et Isabelle son épouse, salariée de l’exploitation, ont vécu les premières mises bas dans leur nouvelle maternité liberté. Les sourires affichés traduisent une première expérience encourageante pour les prochaines bandes de truies.

La liberté n’a pas de prix. Et pourtant, Mickaël Belloeil, éleveur à Saint-Mayeux (22), pourrait contredire cet adage. Depuis le 4 novembre dernier, deux nouvelles salles de maternité de 23 cases liberté chacune sont prêtes à accueillir les premières mises bas de ses truies. Le bâtiment flambant neuf répond non seulement aux attentes sociétales en matière d’élevage mais aussi à la philosophie de l’éleveur à propos du bien-être animal. Mais s’offrir la liberté a un coût : 8 000 € la place. Alors pour financer les investissements, dans une conjoncture économique difficile, Mickaël Belloeil a réussi à contractualiser sa production. « Après l’arrêt de mon activité de multiplicateur, je recherchais des débouchés valorisants pour mes charcutiers. J’ai décidé de signer un contrat « Collectif niveau 2 » (Voir Porcmag avril 2019, page 10) avec l’abattoir Kermené de Collinée (22). Depuis longtemps, je suis à l’écoute des attentes des consommateurs concernant le bien-être animal. Certaines pratiques, comme la démarche sans antibiotiques, sont déjà en place dans l’élevage », rappelle-t-il.

Concrètement, l’éleveur sécurise son prix de revient à moyen terme. « C’est un atout face aux banques. Celles-ci sont sensibles aux garanties quant au paiement de nos porcs et donc aux possibilités de remboursements des traites », souligne Mickaël Belloeil.

Une rémunération indexée sur le coût de l’aliment

À ce jour, l’élevage Belloeil est assuré de pouvoir vendre 58 % de ses charcutiers en étant labellisé Collectif niveau 2. Le surplus de la production sera rémunéré selon le cours du MPB avec les plus-values VPF et PSA zéro jour. Le contrat signé entre l’abattoir Kermené et l’éleveur prévoit que les porcs labellisés seront payés selon un prix prédéfini, déconnecté du MPB, mais tenant compte du coût alimentaire. Un point important en pleine flambée des cours des matières premières.

Le taux de 58 % est le résultat d’une méthode de calcul valorisant la démarche de bien-être animal. La production de Mickaël Belloeil répond en effet à trois critères : une maternité avec des cases liberté, des truies libérées au plus tard six jours après l’IA et un accès des animaux à la lumière naturelle. L’alimentation sans OGM et la démarche sans antibiotiques sont des éléments supplémentaires rémunérés par l’abattoir. « À l’avenir, si mes porcs ont accès à l’extérieur, je remplirai un critère supplémentaire pour demander une augmentation du volume de production valorisée dans le Collectif niveau 2 », souligne l’éleveur.

Le nouveau bloc maternité compte 23 places dans chaque salle. Mickaël Belloeil a souhaité un bâtiment fonctionnel où les déplacements sont facilités. Deux larges couloirs se rejoignent par une traverse en milieu de salle. L’accent a également été mis sur la luminosité, synonyme de bien-être pour les animaux mais aussi pour les intervenants.

De son côté, Gilles Beyer, animateur chez Porc Armor Évolution, précise : « La démarche d’entrée dans le cahier des charges est le fruit d’une réflexion commune entre l’éleveur, l’abatteur et les demandes des consommateurs. Notre groupement accompagne les éleveurs désireux d’accéder à ce contrat. Nous sommes présents pour leur permettre de rejoindre le groupe d’échange entre éleveurs mais aussi sur le plan technique pour leur permettre d’obtenir la meilleure valorisation possible de leur production », explique-t-il.

Une salle, deux ambiances

La construction de la nouvelle maternité a été étudiée afin de répondre aux besoins des porcs mais aussi faciliter les tâches de travail. D’un côté, le bien-être des animaux s’exprime dans des cases spacieuses offrant chacune une surface de 6,75 m² au sol. « Pour garder des cases propres avant la mise bas, nous bloquons les truies à l’entrée en maternité. Elles sont libérées le lundi qui suit la semaine des mises bas, une fois les soins aux porcelets réalisés », explique Isabelle Belloeil, son épouse et salariée. Et d’ajouter : « La première bande est rentrée très facilement dans la nouvelle salle. Et les cochettes ont mis bas en liberté ! Les porcelets ont très bien repéré leur nid, grâce à la chaleur et à la lumière de la lampe, et nous avons pu facilement les attraper pour réaliser les soins. Le travail est plus rapide et nous sommes en sécurité vis-à-vis de leur mère même si celle-ci n’exprime que rarement de signes d’agressivité. » Le système de niche avec sol chauffant et lampe permet de différencier les ambiances et de tabler sur des économies d’énergie. Les truies sont d’ailleurs plus à l’aise avec une température proche des 20 °C et cela se traduit, selon l’éleveur, par une bonne consommation d’aliment et d’eau et par voie de conséquence, un bon déroulement de l’allaitement.

Des premiers résultats encourageants

Désormais, Mickaël et Isabelle œuvrent au sein d’un outil de travail plus fonctionnel. « Nous avons automatisé la distribution à sec de l’aliment péri-mise bas et celui pour la lactation, en récupérant nos anciens doseurs et en ajoutant une chaîne dans chaque salle. Tout est simplifié au maximum afin qu’une personne venant nous remplacer pendant des vacances ou sur un week-end soit rapidement autonome », confirme l’éleveur. Et de préciser : « Nous avons également progressé en matière de biosécurité notamment sur la marche en avant. Les truies n’ont qu’un couloir à traverser pour se rendre en verraterie puis en gestante. Un sas est également à franchir avant d’accéder à l’élevage. » Même si rien n’est jamais acquis avec les animaux, les premiers résultats donnent le sourire à Mickaël et Isabelle Belloeil. Huit jours après les dernières mises bas, avec un faible nombre d’écrasés, 280 porcelets (pour 22 truies) s’égayent autour de leur mère tandis que d’autres se reposent bien au chaud.  

On peut retrouver l'article complet dans notre édition de janvier/février 2022

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